Si aujourd’hui on parle de mondialisation, d’un monde qui est de plus en plus réduit, le concept n’est en réalité pas si nouveau que cela. Déjà, dans les années 1880, Jules Verne soutenait aussi l’hypothèse comme quoi le monde se rétrécit.
Mondialisation ou standardisation ?
Simplement, il n’utilisait pas le mot de « mondialisation », mais celui de « standardisation ». Et il ne voyait pas un monde s’américaniser mais plutôt vivre au rythme de l’empire britannique (les Etats-Unis étant une sorte de variante). Il ne faut pas oublier qu’à la fin du XIXe siècle, la Grande-Bretagne est la première puissance mondiale alors que les Etats-Unis ne sont encore qu’une puissance de second ordre. Jules Verne est d’ailleurs le seul romancier européen à mettre en vedette des Américains, ayant deviné que c’était de ce côté que se trouvait l’avenir, pour le meilleur et pour le pire. Non, dans les années 1880, la seule puissance pouvant porter concurrence à l’empire britannique, est l’empire français. Toutefois, de par ses péripéties impériales, communardes, républicaines, la France restait un cran derrière la Grande-Bretagne.
Vers une disparition de l'inconnu ?
Mais surtout, Jules Verne constatait qu’au fur et à mesure que les explorateurs découvraient toujours plus de lieux jusque-là inaccessibles, les empires coloniaux s’étendaient tout autant et les zones « blanches » (celles jamais visitées par des occidentaux) diminuaient jusqu’à se réduire à rien. Or, à marche forcée, les empires apportaient une manière de vivre et Verne ressentaient l’impression que l’inconnu, que l’extraordinaire, que l’autrement, que l’autre tout court disparaissait. Il imaginait un monde où tout le monde vivrait de la même façon. Dans plusieurs romans, Clovis Dardentor, Un village aérien et, surtout, L’Ile à hélice, des héros, français, se lamentent qu’il n’y ait plus rien à découvrir sur cette planète. Les musiciens de L’Ile à hélice vont jusqu’à se plaindre qu’on ne peut même plus trouver de cannibales : mêmes eux sont désormais « civilisés ». Le temps est proche, semble estimer Verne, où tous les habitants de la terre boiront du thé à five o’clock et paieront en dollars !